Entrer en amitié avec la mort.
En gardant la mort dans ma conscience, comme : l’une des plus grande aventure qui me sera permis de vivre; en la regardant simplement pour ce qu’elle est au niveau terrestre : une des phases du cycle permanent de naissance, vie, mort et renaissance, j’imprègne mon quotidien d’uns richesse supplémentaire, et d’une énergie qui serait autrement gaspillée dans la peur et le déni.
Il y a quelques années j’ai décidé d’entrer en amitié avec la mort. Pour la mienne cela fut facile, avec celle de mes proches, je m’en approche !
Alors que, comme un crabe, la mort tournait autour de moi, cette posture d’amitié, m’a permis d’abord de passer de la peur à la curiosité.
Quel est donc ce grand mystère qui m’effraie autant ?
En faisant défiler ma vie, la mort m’a fait remarquer : qu’elle n’était pas son opposé mais bien son alliée; « Mon opposé c’est la naissance, pas la vie. »: qu’il convenait d’adopter face à la mort, la même posture que nous avions vis-à-vis de la naissance, une acceptation pleine et complète. De la même manière que je n’avais pas discuté ma naissance, je ne discuterais plus ma mort !
Comme j’aimais alors encore beaucoup discuter, je me suis retourné vers la vie. « Si ce n’est pas la mort, quel est ton opposé ? »
Elle n’a pas répondu alors j’ai cherché ! Avant de trouver une réponse satisfaisante à cette question, j’ai observé que le simple fait de me la poser me permettait de passer de la peur de la mort au désir d’exister.
« C’est quoi ma vie ? Certainement pas la peur, le déni, la fuite, la gravité, la solitude et le labeur que je vis aujourd’hui. » Pour me sentir vivant il me fallait retrouver ma joie d’enfant. C’est elle qui me guiderait vers MA vie.
Encore aujourd’hui quand j’oublie cela, mon amie la mort me rappelle, qu’avant de plonger dans son mystère à elle, c’est celui de la vérité de la vie qu’il m’est proposé d’explorer. Merci mon amie.
Cependant, il m’est encore difficile d’entrer en amitié avec la mort de mes proches. Pas de tous, juste de certains même si je les aime autant ! Avant de comprendre cette différence curieuse, je la trouvais curieuse, presque honteuse.
Dans « Aimer à l’infini », Denis Marquet, a développé l’idée que – sous certaines conditions – tristesse et joie pouvaient très bien co-habiter après le deuil d’un être cher.
« Quand on perd un être cher, on perd un être unique. Au moment précis de sa disparition, il est souvent difficile de réaliser à quel point l’être perdu était unique. La relation d’être unique à être unique peut en effet être empêchée pour de multiples raisons : trop d’attentes, d’ego, de système de défense, de personnalité conditionnée. Mais quand l’unicité de l’être disparu nous apparaît pleinement, vient le regret de ne pas l’avoir assez perçue, de ne pas s’en être assez émerveillé. Cette expérience du deuil recèle pourtant quelque chose de positif. Le deuil est là pour nous rappeler l’unique. Il est là pour nous rappeler que chaque moment est unique, mais aussi que chaque être est unique. (…) »
Cette lecture m’a permis de comprendre que le sentiment de joie et de lien que j’avais en pensant à certains défunts, était lié au fait que nous avions partagé, de leur vivant, notre vérité, notre intimité et que d’une certaine manière, nous avions fait le tour, l’un de l’autre !
Si je ressens le manque et la tristesse en pensant à d’autres « chers disparus », il est clair maintenant que c’est de ne pas les avoir vraiment rencontré, dans leur intimité, leur vérité, dans ce qu’ils avaient d’unique. Qui était-il ? De quoi était-elle faite ? Je peux maintenant comprendre pourquoi je ressens ce sentiment de tristesse et de manque pour des êtres chers encore vivant.
Mon amie la mort me dis que, je si ne veux pas ressentir sa morsure, je dois rencontrer l’autre dans ce qu’il a d’unique. « Mais comment faire cela ? La plupart du temps on arrive à peine à se parler vraiment, a partager l’intime, le vrai. Elle garde son masque. Il se cache derrière des banalités. »
Pas facile. Alors je peux fuir cette réalité, entrer dans le dénis, tourner le dos, mettre un voile sur le fait qu’il ou elle va mourir, qu’un jour c’est moi qui ferais face ce mystère.
J’ai fait ce choix pendant des années. Je me suis anesthésié pour ne pas ressentir la mor(t)sure. Heureusement la douleur à été plus forte et m’a guidé vers un cercle vertueux : « l’autre c’est moi ».
Partir d’abord et avant tout à la découverte de l’être unique que je suis. Vivre pleinement et sincèrement ma vie, du mieux que je peux.
En vivant et partageant ma vérité, je m’offre la possibilité de rencontrer l’autre dans ce qu’il a d’unique. J’offre à l’autre la possibilité de dévoiler l’être unique qu’il est. Nous entrons dans un cercle vertueux. Et plus nous sommes nombreux à faire cela plus la joie l’emporte sur la souffrance et la tristesse, le sentiment de lien et d’unité sur le manque et la solitude.
Entrer en amitié avec la mort c’est d’abord entrer en amitié avec moi-même, pour accepter de vivre, du mieux que je peux, ma vérité. Partager, à chaque fois que cela est possible, la vérité avec les autres. En particulier ceux qui me sont chers et dont je pourrais appréhender la perte.